Les référence précises sont les suivantes:
8 (1962),41-53; 6 (1960),3-17; 6
(1960),18-26; 8 (1962),238-251; 7 (1961),281-285.
Par la suite, ces textes, complétés par une Bibliographie
de l'arithmétique écrite par F. Châtelet, ont été regroupés dans le numéro 6
des "Monographies de l'Enseignement Mathématique" (numéro épuisé), dont ils
occupent les 80 premières pages. [Les pages 81 à 127 sont consacrées à un article de
Paul Erdös intitulé Quelques problèmes de la théorie des nombres.]
Étant alors étudiant en licence de
mathématiques à Grenoble, et déjà pourvu d'un goût prononcé pour l'arithmétique,
j'ai écouté les exposés, et, dès la fin de mes études, me
suis tourné vers les aspects algébriques de la théorie des
nombres, influencé par l'exposé de Châtelet, consacré aux courbes elliptiques,
introduites via le théorème de Fermat pour l'exposant 4 en liaison avec la courbe y2=x(x2+1), et par celui de Pisot,
montrant la riche extension de l'arithmétique que permet la notion d'entier algébrique.
Je ne savais pas à l'époque que l'exposé de Chabauty, montrant sur l'exemple des minima
des formes quadratiques réelles à deux variables que la théorie des nombres peut faire
bon ménage avec les nombres réels, aurait bien plus tard une influence sur le choix de
mes recherches, et je dois dire que j'ai toujours suivi avec intérêt
ce qui se passe dans le domaine des approximations diophantiennes, même
si les exposés de Descombes et de Poitou ne m'ont pas conduit à effectuer moi-même des recherches dans ce domaine.
Les Journées Arithmétiques étaient loin de ressembler à
ce que nous connaissons maintenant, où l'on fait un large tour d'horizon des progrès
récents de la théorie des nombres. Il s'agissait plutôt d'une opération de
vulgarisation et de propagande, et la salle de conférences de l'ancien Institut Fourier
de Grenoble, certes de taille modeste, fut bien garnie, grâce en particulier à la
participation de nombreux professeurs de l'enseignement secondaire. De ce point de vue,
ces premières Journées furent une réussite.
Il fut aussi décidé par les conférenciers que
l'expérience devrait être répétée. Ce fut fait grâce aux deux
autres conférenciers provinciaux, qui organisèrent les deuxièmes et troisièmes
Journées Arithmétiques à Lille en 1963 et à Besançon en 1965.
C'est de cette époque lointaine que date la tradition
discutable de ne pas organiser les Journées Arithmétiques à Paris.
L'année 1963 marque une évolution radicale de l'université
française, sensible dans tous les domaines de la science, et particulièrement en
mathématiques: un important recrutement d'assistants eut lieu en France au début des
années soixante. Les Journées de Lille furent l'occasion pour Georges Poitou de mettre
dans le bain les assistants Lillois avec l'exceptionnel dynamisme qui ne l'abandonna
jamais. L'auditoire fut constitué essentiellement de chercheurs professionnels, les
exposés restant encore pour l'essentiel le fait de professeurs de la génération
précédente.
L'évolution de la structure du corps enseignant des
universités a entraîné l'apparition aux Journées de Besançon organisées en 1965 par
François Châtelet des premiers exposés rendant compte de travaux originaux de jeunes
chercheurs; Georges Poitou fit en sorte qu'il y eut encore une solide implication des
Lillois, en faisant faire par les plus jeunes des exposés sur des articles qu'il avait
choisis.
C'est en 1967, avec les Journées Arithmétiques de Grenoble,
que la vague de recrutements du début des années 1960 fit pleinement sentir ses effets.
Les organisateurs décidèrent de consacrer l'essentiel du temps de parole à l'exposé de
thèses fraichement soutenues ou sur le point de l'être. Ces
Journées virent aussi pour la première fois la participation de quelques mathématiciens
étrangers de passage en France.
L'ouverture.
Il fut décidé à Grenoble que les Journées Arithmétiques
prochaines seraient organisées à Marseille, au mois de mai de l'année suivante, à
l'Université Saint-Charles, au centre de la ville. La situation politique française en
décida autrement: la France fut paralysée pendant près d'un mois par les
"événements de mai". Les organisateurs durent in extremis annuler les
Journées quelques jours avant la date prévue de leur ouverture.
Les collègues marseillais, encore sous le choc,
préférèrent laisser passer leur tour. Jean Fresnel saisit alors la balle au bond, et
proposa l'organisation à Bordeaux des 5ièmes Journées Arithmétiques à
l'automne 1969. Un groupe important d'arithméticiens d'une trentaine d'années venait de
s'installer à Bordeaux, en particulier sous l'influence de Pisot, qui y avait été lui même professeur quelques années auparavant. C'était l'occasion de faire
connaître notre université, et nous prîmes l'initiative d'inviter plusieurs collègues
étrangers, accompagnés s'ils le souhaitaient par l'un de leurs doctorants.
L'internationalisation, déjà quelque peu programmée pour l'année précédente, était
en marche.
La tradition d'éditer les actes dans une publication
officielle fut reprise, et j'en assurai l'édition, grâce au soutien de la S.M.F. qui mit
un volume de ses Mémoires à notre disposition.
Les Journées Arithmétiques suivantes eurent lieu en 1971,
à Marseille comme il se doit. Pour des raisons techniques, l'université de
Saint-Jérôme remplaça l'université de Saint-Charles prévue en 1968. Il y eut quelques
soubressauts post-1968 au cours d'une séance présidée par Bateman. Celui-ci sut trouver
les mots justes à dire aux étudiants, avec la sagesse et le doigté que confèrent
l'âge et une longue expérience des campus américains.
Les Journées Arithmétiques suivantes, organisées en 1973,
furent les troisièmes Journées grenobloises. Les organisateurs innovèrent,
transgressant l'usage de les organiser avant les examens de juin ou au mois de septembre,
en les faisant se tenir au mois de février. Les participants eurent la chance de pouvoir
découvrir le ski de fond, que les Jeux Olympiques d'hiver avaient fait connaître aux
grenoblois cinq ans auparavant. L'idée de 1967, consistant à privilégier les exposés
des jeunes au voisinage de la thèse, fut maintenue. De ce fait, les conférenciers de
1967 furent assez souvent remplacés par leurs élèves.
Les Journées retrouvèrent une date canonique, au printemps
de 1974, avec leur seconde édition bordelaise, organisée par Pierre Damey. L'exposé par
Heini Halberstam mit en lumière les travaux de Chen sur la conjecture de Goldbach (2n=p1+p2 ou p1+p2p3),
qui, publiés dans une obscure revue chinoise, n'avaient pas connus la diffusion qu'ils
méritaient. En même temps que la date canonique, les Journées
retrouvèrent l'édition d'un volume d'actes, comme ce fut le cas déjà à Bordeaux en
1969, et encore une fois avec la complicité de la S.M.F., qui mit à la disposition des
organisateurs un volume double d'Astérisque, une publication créée peu de temps
auparavant. Depuis, les actes des Journées ont été systématiquement publiés.
Les Journées Arithmétiques suivantes furent organisées à
Caen au printemps de 1976, par un temps plus estival que printanier, sous la
responsabilité de Roger Apéry. Deux nouveautés, imposées par le succès croissant de
l'institution, et dont l'usage s'est maintenu jusqu'à présent, furent introduites à la
suite de discussions tenues à Bordeaux: d'une part, on décida de consacrer les matinées
à des conférences d'exposition, permettant de faire le tour d'un sujet; d'autre part, on
fractionna les après-midis en plusieurs thèmes faisant l'objet d'exposés plus courts
ayant lieu en parallèle. Les Journées Arithmétiques ont depuis fonctionné ainsi.
Malgré tout, le temps faisant défaut, on travailla jusqu'au samedi à midi, où deux
conférences eurent lieu devant un amphithéâtre comble. Qui oserait de nos jours se
risquer à dépasser les cinq jours traditionnels?
Peu avant les Journées, Roland Gillard fut amené à changer
le titre initialement prévu de son exposé pour adopter la formulation "µ=0",
Ferrero et Washington ayant résolu quelques mois auparavant la conjecture célèbre de la
théorie d'Iwasawa sur les Zp-extensions
cyclotomiques.
Après Caen, les Journées Arithmétiques eurent lieu une
seconde fois à Marseille, en 1978, cette fois à l'université nouvelle de Luminy, sous
la responsabilité de Gérard Rauzy. Il y eut un événement pendant ces Journées: la
conférence d'Apéry au cours de laquelle fut annoncée la preuve de l'irrationalité de z(3).
Certes, les avis étaient partagés à l'issue de l'exposé quant à la fiabilité de la
démonstration. L'avenir a prouvé que les idées étaient bonnes, et même
exploitables de façon relativement directe.
Les Journées Arithmétiques deviennent européennes.
Lors des Journées de Marseille, un "collectif" de
collègues anglais fit la proposition, "afin de remercier les arithméticiens
français pour leurs nombreuses invitations", de tenir en Angleterre les Journées
suivantes. Cette proposition fut acceptée avec enthousiasme, et les Journées
Arithmétiques de 1980 furent organisées pendant la période de Pâques dans la charmante
ville d'Exeter, au sud de l'Angleterre, dont l'université est bien adaptée à l'accueil
de congressistes. À la demande de Poitou, il fut souhaité que les Journées aient lieu
néanmoins une fois sur deux dans leur pays d'origine. Cette alternance a été respectée
jusqu'à présent.
Le "scoop" fut cette fois l'annonce pendant le
congrès de la démonstration par Mazur et Wiles de la "conjecture principale de la
théorie d'Iwasawa", ce qui résolvait du même coup la
conjecture proposée par Georges Gras lors du dernier exposé des Journées de Caen. Les
organisateurs avaient eu la sagesse de laisser un peu de place dans la liste des exposés
principaux. Il fut ainsi possible à John Coates de faire deux conférences sur ce
résultat.
Malgré le souhait souvent exprimé dans le passé de fixer
à deux ans la périodicité de Journées Arithmétiques, les suivantes (pour des raisons
techniques) furent organisées par Georges Rhin dès l'année 1981, à Metz, un site
privilégié pour l'ouverture vers l'Europe. De fait, les mathématiciens allemands
fournirent pour la première fois un grand nombre de congressistes, un fait important pour
l'avenir de Journées.
Depuis les Journées de Metz, la périodicité de deux ans a
été la règle, et l'alternance nous conduisit en 1983 aux Pays-Bas, où Hendrik Lenstra
et Robert Tijdeman organisèrent les Journées Arithmétiques au début de l'été dans le
centre de congrès de Noordwijkerhout, à mi-chemin entre leurs universités respectives
d'Amsterdam et de Leyde (=Leiden). L'événement fut cette fois l'annonce faite quelques
semaines auparavant de la démonstration, après quelque soixante ans de résistance, de
la conjecture de Mordell. Les organisateurs mirent sur pied rapidement une conférence de
Gerd Faltings, qui mobilisa l'essentiel des congressistes en une fin d'après-midi.
Le retour en France nous conduisit pour la deuxième fois à
Besançon, où Jean Cougnard organisa en 1985 les 1ièmes
Journées Arithmétiques, exactement 20 ans après celles de François Châtelet. Tout le
monde apprécia leur excellente organisation, au sein d'une ville à taille humaine.
Il fut décidé à Besançon que les Journées Arithmétiques
suivantes auraient lieu à Ulm en 1987, ville elle aussi à taille humaine. Je me souviens
que quelques sourires accueillirent l'annonce que l'adresse précise serait Eselsberg.
Leur organisation par Wirsing, un ancien des Journées, puisqu'il était présent à
Bordeaux en 1969, fut un succès.
En 1989, Marseille accueillit les Journées Arithmétiques
pour la troisième fois, sur le campus de Luminy comme en 1978. Entre temps, un
événement important pour les mathématiciens français avait eu lieu: l'aménagement en
centre de congrès (le C.I.R.M.) sur le site de Luminy d'une ancienne demeure
provençale. Grâce à la ténacité de quelques uns, dont Georges Poitou, décédé peu
après ces Journées. auxquelles sa santé ne lui avait pas permis de participer, la
communauté mathématique française avait enfin son "Oberwolfach". Gilles
Lachaud, le premier directeur du C.I.R.M., organisa à Luminy, autour du C.I.R.M., ces 16ièmes Journées Arithmétiques. La taille des actes, qui occupent
un volume triple d'Astérisque, a atteint à cette occasion un maximum.
À Marseille, ce fut la Section de Mathématiques de
l'Université de Genève, en les personnes de Daniel Coray et Yves-François Pétermann,
qui fut désignée pour organiser l'édition suivante. Vu l'exiguïté des locaux propres
de la Section, les conférences eurent lieu à l'Université de Genève, sur les bords de
l'Arve, tout près du centre de la ville.
Pour la 18ième édition
des Journées Arithmétiques, prévue en France, la candidature de Bordeaux, par la taille
de son équipe de théorie des nombres, s'imposait, après presque 20 ans d'interruption.
J'eus le redoutable honneur d'être chargé de l'organisation pour
1993, tâche dont je m'acquittai avec la collaboration de Francine Delmer.
L'annonce avant les vacances d'été de la démonstration par
Wiles de la conjecture de Fermat, sans aucun doute le plus célèbre des problèmes qui
aient atteint le grand public, nous obligea à changer nos plans. La présence de
Jean-Pierre Serre et l'invitation in extremis de Richard Taylor nous permirent de
consacrer une matinée à l'exposé d'un schéma de démonstration, dont les zones d'ombre
ne furent pas cachées. Comme on le sait maintenant, il restait à cette époque une
sérieuse lacune, et je dois dire que Serre nous mit en garde. À l'heure où j'écris ces
lignes, cette lacune est comblée, et tout le monde gardera de ces Journées le souvenir
de "Fermat" plutôt que celui du temps épouvantable qui avait régné au cours
de cette semaine de Septembre.
À Bordeaux, Pilar Bayer s'est proposée pour organiser à
Barcelone les 19ièmes Journées Arithmétiques. Cet
aperçu historique prend fin avec ce rendez-vous pour juillet 1995 dans la métropole
catalane.
Talence, le 1e
mai 1995
P.S. (Le 23 octobre 1998.)
(1) J'aimerais corriger deux points du texte ci-dessus:
(a) J'ai oublié (remarque de J. Cougnard) de mentionner les actes des Journées de 1973.
L'oubli est réparé page suivante, où j'ai de façon plus générale mis à jour la
bibliographie.
(b) Il faut ajouter le nom de Michel Mendès France à celui de Jean Fresnel comme
organisateurs des Journées Arithmétiques e Bordeaux de 1969.
(2) Les Journées de 1995 ont eu lieu comme prévu au mois de juillet
à Barcelone sous la responsabilité de Pilar Bayer. Elles ont été suivies par celles de
Limoges organisées par Jean-Pierre Borel en 1997, au mois de septembre. Les prochaines
Journées, organisées par René Schoof, auront lieu à Rome en 1999, au mois de juillet.
Liste des Journées Arithmétiques
Nous donnons ci-dessous la liste des Journées
Arithmétiques ainsi que les références des actes des Journées qui ont fait l'objet
d'une publication "officielle". La liste des actes ne tient pas compte de divers
recueils de textes qui ont été polycopiés à l'initiative d'universités
organisatrices.
Les revues qui ont accueilli des actes sont: